Jurisprudence en matière de protection du logiciel

publiée dans la revue Expertises des systèmes d'information


Tribunal de Grasse : Un producteur de phonogrammes MIDI bénéficie de la protection du CPI.
Une action en contrefaçon portant sur 1900 logiciels
Les saisies contrefaçon descriptives révèlent les copies serviles
Détention et utilisation illicites d'un logiciel
L'arbitrage de l'APP prime l'ordre judiciaire
Quelle marge d'appréciation du juge face au rapport d'expertise ?
Les polices de caractères sont protégeables
L'antériorité du manuel d'utilisation établit la contrefaçon
L'effort créatif personnalisé, critère d'originalité
Comment s'apprécie la contrefaçon ? Une question théorique et deux réponses différentes, avec les affaires ESI et Sybel
Architecture d'organisation de modules et contrefaçons
Un directeur informatique condamné pour contrefaçon de logiciels
Le dépôt à l'APP, preuve de la titularité des droits d'auteur sur un logiciel et protection du nom de ce logiciel
Contrefaçon d'une ébauche de programme inscrite au répertoire de l'APP
Escroquerie et contrefaçon : deux hackers condamnés
Protection sur Internet
Mise à jour pirate du système d'exploitation WANG
Contrefaçon par l'ancien DG et quatre collaborateurs
De nouveaux marchés pour les contrefacteurs : les forums de discussion sur le web
L'interpolarité : une limite à la protection du logiciel
Les articles 47 de la loi du 3 juillet 1985, et 425 et 426 du code pénal sont applicables quelle que soit la date de création du logiciel concerné
Epilogue : Le contrefacteur se retourne contre son conseiller juridique
Logiciel inadapté : responsabilité du sous-traitant
Compensation de dettes et logiciel
Droit d'utilisation de logiciel ? Deux hypothèses
Quand l'obstruction à la saisie-contrefaçon entraine la présomption de contrefaçon
Un auteur de logiciel coupable de complicité de publicité mensongère
Rapport d'expert et appréciation du préjudice subi par l'auteur du logiciel
L'épuisement des droits favorise la commercialisation du logiciel
Concurrence déloyale autant que contrefaçon
Refus de protection au "look and feel"
Une personne physique est l'auteur d'un logiciel qualifié d'oeuvre collective
Oeuvre collective : présomption de paternité
Droits du commanditaire sur le logiciel développé ?
Violation du droit moral : un dommage évalué à 9 950 272 F
Auteur salarié : oeuvre collective
Auteur salarié : L.113-9 du CPI
Un faisceau de présomptions conduit à la qualification d'oeuvre collective
Une leçon à tirer : une action en contrefaçon se prépare
La procédure de saisie-contrefaçon est d'ordre public
Une protection envers et contre tous
"L'apport créatif personnalisé" : un critère incertain
L'épuisement des droits en matière de distribution de logiciels
Contracter de bonne foi avec un contrefacteur : pas de délit
Concurrence parasitaire plutôt que contrefaçon
Les opérations de saisie contrefaçon avaient été mal conduites
Le logiciel ne se dissocie pas de ses codes sources
Propriété du logiciel et exception de transaction
Le droit au respect du nom en cas de cession
8 000 000 F de dommages-intérêts pour contrefaçon
Manque d'originalité : pas de droit d'auteur mais concurrence parasitaire
La reproduction illicite d'un logiciel n'est pas constitutive d'un vol mais d'une contrefaçon
Le commerce de la contrefaçon sanctionné par 270 000 F d'amende
Trois fois coupable
La cession des droits d'auteur n'est jamais tacite
Contrefaçons en violation des droits des auteurs et de leurs licenciés


Tribunal de Grasse : Un producteur de phonogrammes MIDI bénéficie de la protection du CPI.
Midi Musique / Sylvie G.
TGI de Grasse, jugement correctionnel du 10.11.2000

En définissant les fichiers MIDI comme le système qui "permet de reproduire, d'utiliser des sons d'enregistrement préexistants dans le but de créer une œuvre sonore nouvelle à l'aide de l'ordinateur", le tribunal de Grasse, dans un jugement correctionnel rendu le 10 novembre 2000, a considéré que la société Midi Musique, qui crée et produit des phonogrammes MIDI, était un producteur de phonogrammes au sens des articles L213-1 et suivants du CPI.
Dès lors, la gérante de Maxi Music a été déclarée coupable pour avoir reproduit sur disquette et distribué à certains clients à titre de gratification lors d'achats importants sans l'autorisation de Midi Musique les fichiers MIDI qui était mis à sa disposition dans le cadre d'un contrat souscrit entre les parties. Le tribunal a exclu toutefois l'infraction de vol car les fichiers lui avait été remis volontairement. Haut de la page


Une action en contrefaçon portant sur 1900 logiciels
Agence pour la Protection des Programmes / M.H
TGI de Meaux, Jugement correctionnel du 08.10.1998

Le tribunal de grande instance de Meaux a reçu l'Agence pour la Protection des Programmes en sa constitution de partie civile, dans une affaire portant sur la contrefaçon de 1900 programmes informatiques et logiciels. Le contrefacteur a été condamné à 6 mois de prison avec sursis, ainsi qu'à verser à l'APP, 20 000 F de dommages et intérêts et 5 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale .Haut de la page


Les saisies contrefaçon descriptives révèlent les copies serviles
Wang Laboratoires Inc., Wang France, APP / EDA, EDA System, et les autres
TGI Paris, 06.11.1992

Ayant fait procéder à des saisies-contrefaçons descriptives de logiciels présumés contrefaisants, les sociétés Wang ont pu faire sanctionner les agissements de leur ancien distributeur qui, après la résiliation du contrat de distribution dont il avait bénéficié, continuait cependant de commercialiser les logiciels litigieux et d'en effectuer, pour ce faire, des copies contrefaisantes. Condamnation également des sociétés utilisatrices ayant, sans y être autorisées, sciemment utilisé des logiciels alors qu'elles savaient cette autorisation nécessaire.Haut de la page


Détention et utilisation illicites d'un logiciel
CFI / HTI et les autres
TGI de Paris, 08.01.1993

Deux anciens employés du Centre Français Informatique (CFI) sont accusés d'avoir contrefait au sein de l'entreprise un logiciel de gestion comptable appelé Harmonie et d'en avoir installé deux exemplaires chez HTI. Après saisie-contrefaçon, CFI, titulaire des droits d'auteur sur ce logiciel, déposé à l'APP, saisit le TGI de Paris. Un des deux exemplaires installé dans l'ordinateur comportait la dénomination Harmonie et l'autre était matérialisé par une bande renfermant "un état incomplet du développement du progiciel Harmonie".
La condamnation s'appuie donc sur la détention et l'utilisation illicites d'un logiciel.
Cet arrêt rappelle la double prohibition de l'article L 122-6 du code de la propriété intellectuelle : il est interdit d'utiliser un logiciel sans autorisation de l'auteur; d'autre part," toute reproduction autre que l'établissement d'une copie de sauvegarde par l'utilisateur" est illicite sans qu'il y ait à rechercher si le système est ou non opérationnel.Haut de la page


L'arbitrage de l'APP prime l'ordre judiciaire
DDS Informatique / Ozone, et autres
TC Paris, 30.03.1993

Heureuse décision que celle de ce tribunal qui, conformément à l'article 7 du règlement APP, se déclare incompétent au profit de la commission d'arbitrage de l'APP. En réalité, ce n'est là qu'une juste application du droit arbitral et de l'opposabilité des clauses compromissoires. En l'espèce, deux sociétés adhérentes de l'APP se trouvaient au coeur d'un litige afférent à la propriété d'un logiciel ; dès lors, elles ne pouvaient faire fi de l'application du règlement auquel, du fait de leur adhésion, elles devaient se soumettre.Haut de la page


Quelle marge d'appréciation du juge face au rapport d'expertise ?
Soproga Informatique, Soproga, Me Mariani, APP / Logique Industrie, et les autres
TGI Aix-en Provence, 15.04.1993,

Conformément au rapport d'expertise, le tribunal a débouté les sociétés Soproga et Soproga Informatique de leur action en contrefaçon menée contre une société concurrente, Logique Industrie, au motif que, s'il existait de nombreuses similitudes en ce qui concerne les fonctionnalités des logiciels litigieux, le produit développé par Logique Industrie présentait des différences déterminantes aux yeux de l'expert, ayant trait au langage de programmation, nombre de lignes de code, et autres noms de procédure. En revanche, le tribunal fit droit à l'action en concurrence déloyale, relevant dans le même rapport expertal que "Logique Industrie (avait) nécessairement utilisé les recherches menées par la Soproga pour son logiciel Supersyn et que ces renseignements n'ont pu lui être fournis que par Christian B. et André C" (anciens salariés de Soproga).Haut de la page


Les polices de caractères sont protégeables
Frédérique B, Makar / Nicole B et l'APP
T G I de Paris le 08.10.993

Frédérique B attaque Nicole B et France B aux fins de constatation judiciaire d'actes de contrefaçon. En effet, elle prétend qu'un progiciel d'écriture en langue indienne développé par elle et commercialisé par la société Makar a servi à la réalisation d'un dictionnaire hindi français et que Nicole B et France B avaient deux copies de démonstration de ce progiciel sans qu'aucun droits d'utilisation à des fins de création ait été cédé par elles.
Le tribunal de grande instance de Paris s'est penché à cette occasion sur deux questions à savoir dans quelle mesure une police de caractères est susceptible d'être protégée par les textes régissant la propriété littéraire et artistique et ensuite à savoir si elle remplit le critère d'originalité imposé par la loi du 3 juillet 1992.
Les polices de caractères devant être considérées comme des ressources, c'est-à-dire comme l'ensemble des éléments nécessaires au fonctionnement d'un processus, celles ci constituent un logiciel et sont donc protégeables au titre de l'article 112-2 du code de la propriété intellectuelle.
De plus, Frédérique B n'a pas mis en oeuvre un simple alphabet mais a fait preuve d'un effort personnalisé qui donne à l'oeuvre son caractère original.
Enfin, la cession des droits de l'auteur ne peut être reconnue puisqu'aucun contrat écrit entre les parties ne le stipulait.
Cette décision est importante car elle qualifie les caractères typographiques d'oeuvres de l'esprit, leur permettant ainsi d'être protégés au titre de la propriété littéraire et artistique.Haut de la page


L'antériorité du manuel d'utilisation établit la contrefaçon
GPL Système, APP / Scomi, et les autres
Cour d'appel de Paris, 1 06 1994

Le logiciel et le manuel n'avaient été déposés qu'après l'installation du logiciel soupçonné de contrefaçon. Dans un premier temps judiciaire, la demande de CPL et de l'APP près de qui elle avait déposé, avait été écartée, aux motifs qu'elle n'avait pas apporté de preuve de l'antériorité des droits. Aussi, les demanderesses avaient-elles changé de stratégie.
Dans un deuxième temps, elles ont limité leurs prétentions à la contrefaçon du manuel d'utilisation. La cour a considéré que cette documentation, qui établissait suffisamment l'antériorité, était par ailleurs une oeuvre de l'esprit protégeable à ce titre. Haut de la page


L'effort créatif personnalisé, critère d'originalité
Ministère public, Frédéric H et l'APP / Stéphane D, et les autres
Cour d'appel de Paris le 20.12.1991, 09.07.1993
Cour de cassation le 12.10.1994

Fredérique H déclare être l'auteur unique des disquettes du logiciel que Stéphane D a emporté lors de son départ de la société Médiation.
La cour d'appel de Paris est saisie pour connaître le titulaire des droits de propriété.
Frédérique H, ayant conçu ce logiciel avant d'être engagé dans la société, il est donc le seul créateur du logiciel dont Stéphane D prétend être le coauteur.
Le deuxième arrêt , après expertise, condamne Stéphane D pour contrefaçon. En effet, l'oeuvre de Frédérique H, ayant apporté un effort créatif et personnalisé, est considéré comme étant originale ; elle peut bénéficier de la protection accordée aux oeuvres de l'esprit. Le tribunal indique que, même dans un cadre où le déroulement du logiciel obéit à une logique contraignante, l'auteur dispose d'un champ créatif lui permettant d'y apposer son empreinte.
Enfin, le simple fait pour Stéphane D d'installer le logiciel dans ses locaux constitue une reproduction litigieuse, peu important que le système ait été ou non commercialisé.Haut de la page


Comment s'apprécie la contrefaçon ? Une question théorique et deux réponses différentes, avec les affaires ESI et Sybel
Engineering Systems International (ESI), APP / Mecalog, et autres
TC Paris, 22.11.1993,
Cour d'appel de Paris, 10.11.1994

Mécalog, société créée par un ancien salarié de Esi, puis rejoint par deux autres, hautement spécialisés, a commercialisé à brefs délais un logiciel du même type que celui développé par Esi. Le rapport d'un collège expertal fait apparaître qu' "un petit nombre de lignes nouvelles ou réécrites (par la société Mecalog) (...) sont incontestablement inspirées des programmes d'ESI; qu'en conséquence, on doit constater l'existence d'une contrefaçon résiduelle..."
Si les premiers juges retiennent une contrefaçon limitée, la cour d'appel juge que le logiciel contesté présente une composition nouvelle ne portant que sur des éléments dont l'originalité n'est pas avérée. L'arrêt écarte donc la contrefaçon pour accueillir la concurrence déloyale. Les agissements de Mécalog sont sanctionnés d'une condamnation de 6.000.000 F en réparation du préjudice estimé subi par Mécalog. Il faut noter que dans ce type d'action judiciaire, la poursuite de la commercialisation n'est pas interdite.Haut de la page


Architecture d'organisation des modules
Sybel Informatique / Prolepse, et autres
TGI Paris, 12.11.1992,
Cour d'appel de Paris, 23.11.1994

Scénario bien connu, deux ex-employés de la société Sybel, qui avaient pris part à la mise au point d'un système de communication, ont créé, sitôt leur démission acceptée, leurs propres sociétés (Prolepse et Oxalead) puis lancé sur le marché un produit offrant les mêmes fonctionnalités que celui proposé par Sybel.
Le tribunal de grande instance, puis la cour d'appel de Paris, après avoir pris acte des similitudes, se sont demandé si celles-ci portaient sur des éléments donnant prise au droit d'auteur. Fort classiquement au regard de l'histoire jurisprudentielle des dernières années, l'arrêt analyse le critère de l'organisation des modules et retient que les emprunts d'architectures étaient significatifs, constituant ainsi la contrefaçon.
Outre la condamnation des contrefacteurs à 5 000 000 F, la cour a prononcé l'interdiction de la commercialisation du logiciel contrefaisant.Haut de la page


Un directeur informatique condamné pour contrefaçon de logiciels
TC Cusset (Allier), 12.04.1996

Le directeur informatique et le Pdg de la société Cedi sécurité ont été condamnés pour avoir dupliqué des logiciels. Selon un procédé classique, le directeur informatique avait donné des instructions à un technicien de son service afin qu'il reproduise en plusieurs exemplaires des logiciels acquis légalement et les installe sur l'ensemble des micro-ordinateurs de l'entreprise. Ce responsable affirme avoir informé le Pdg des copies qu'il avait fait pratiquer et de leur caractère illégal. Il lui aurait en outre signalé le coût élevé que représenterait l'acquisition de licences d'utilisation s'il tenait à remplacer les contrefaçons. Face à l'absence de réaction de son supérieur, le directeur informatique n'a pas fait désinstaller les copies pirates qui ont continué à être utilisées par le personnel de l'entreprise
A l'occasion d'une perquisition, les gendarmes de la section de recherche de Clermont-Ferrand ont constaté l'existence de copies pirates sur les disques durs des micro- ordinateurs de Cedi sécurité. Sur plainte de l'Agence pour la protection des programmes (APP), le tribunal correctionnel de Cusset (Allier) a condamné, le 12 avril 1996, le Pdg de la société et son directeur informatique, respectivement à 100 000 F et 8 000 F d'amende. La contrefaçon de logiciel est en effet un délit sanctionné par l'article L.335-3 du code de la propriété intellectuelle. L'Agence pour la protection des programmes a obtenu le franc de dommages-intérêts qu'elle réclamait.
Cette décision pénale, une première en la matière, rappelle que toute reproduction de logiciels est interdite et que le salarié n'est pas irresponsable pénalement, même lorsqu'il agit pour les besoins de l'entreprise. Non seulement un responsable informatique ne doit pas effectuer ou faire pratiquer de duplications illégales de logiciels, mais il doit veiller à ce que le personnel de l'entreprise n'utilise pas de copies pirates.
Par ailleurs, le simple fait de prévenir sa hiérarchie de la présence de telles copies ne l'exonère nullement de sa responsabilité. Haut de la page


Le dépôt à l'APP, preuve de la titularité des droits d'auteur sur un logiciel et protection du nom de ce logiciel
Microformatic / Jean-Bernard C. et l'Agence pour la protection des programmes (APP) ;
CA de Paris, 06.10.1995

Jean-Bernard C. a enregistré à l'APP le logiciel GPF qu'il a crée. Engagé par la suite par la société Microformatic, Jean-Bernard C. aurait consenti à cette dernière le droit exclusif d'exploiter le logiciel, sans toutefois convenir des modalités par écrit. Après avoir constaté l'impossibilité d'une concertation pour l'exploitation de son logiciel,
Jean-Bernard C., rompt son accord verbal avec son employeur et passe une convention portant sur le logiciel GPF avec une société américaine.
Confirmant dans son intégralité la décision des premiers juges, la Cour écarte l'article 45 de la loi du 3 juillet 1985 relatif à la dévolution des droits au bénéfice de l'employeur, en jugeant que le logiciel a été crée par Jean-Bernard C. avant son embauche puisqu'il l'a enregistré au préalable à l'APP. Pour la Cour, le dépôt auprès de l'APP à Jean-Bernard C. d'établir la preuve de ses droits d'auteur sur le logiciel.
Elle ajoute que faute pour les parties d'avoir signé un contrat écrit en raison de leur désaccord persistant sur les modalités, Jean-Bernard C. n'a pu céder à la société Microformatic l'exclusivité des droits sur le logiciel. C'est donc à bon droit qu'il a effectué la tractation reprochée, en tant que titulaire des droits du logiciel.
Enfin, la Cour considère que le dépôt de la marque GPF effectué par la société Microformatic auprès de l'INPI est frauduleux, puisque que Jean-Bernard C. avait antérieurement enregistré à l'APP son logiciel sous ce nom.
Aux termes de cette décision qui rappelle l'intérêt d'un dépôt de logiciel, l'APP s'est vu allouer 20 000 F de dommages-intérêts ainsi qu'une somme de 10 000 F au titre des frais non compris dans les dépens.Haut de la page


Contrefaçon d'une ébauche de programme inscrite au répertoire de l'APP
3 V Finance / FL Software, Patrick L. et Alexandre F. ;
TGI de Paris, 31.05.1995

La société 3 V Finance a fait procéder à la saisie-contrefaçon d'un logiciel réalisé par d'anciens employés devenus dirigeants d'une société concurrente FL Software. Le TGI saisit du litige a ordonné la comparaison du logiciel prétendument contrefaisant aux différentes versions du logiciel déposées à l'APP. L'expertise a caractérisé des
emprunts significatifs par rapport à une ancienne version du logiciel contrefait, d'où l'intérêt d'effectuer des dépôts des versions successives pour authentifier l'historique de la création.
Le TGI constatant les actes de contrefaçon reprochés, rappelle que la simple ébauche d'un programme même non exploité, peut accéder à la protection conférée par le droit d'auteur, dès lors qu'elle est suffisamment concrétisée.
Compte tenu du temps de développement et des investissements financiers épargnés par la société contrefactrice, le logiciel concurrent qu'elle a réalisé a pu être commercialisé à un prix inférieur à celui proposé par la société 3 V Finance, dont le préjudice a ainsi pu être caractérisé par le tribunal.Haut de la page


Escroquerie et contrefaçon : deux hackers condamnés
TC Metz, 01.02.1996

Suite à une plainte déposée par l'Agence pour la protection des programmes, le Tribunal correctionnel de Metz vient de condamner, le 1er février dernier, deux jeunes pirates à six mois d'emprisonnement avec sursis, pour contrefaçon et escroquerie.
Ceux-ci étaient accusés d'avoir déplombé et dupliqué des logiciels de jeux, pour les diffuser sur un réseau de pirates le jour même de leur lancement commercial.

Un journal, diffusé sur le serveur, faisait la publicité de ces logiciels contrefaits.
L'argument - classique - de la défense, à savoir la curiosité (on fait ça "pour le fun") fut fort heureusement inopérant, surtout lorsqu'on sait que l'un des prévenus s'était également "amusé" à pirater des numéros de cartes bancaires en se connectant sur le réseau téléphonique.

Ce stratagème leur avait permis de passer par correspondance diverses commandes, dont un camescope.

Outre l'indemnisation des victimes de cette escroquerie et l'allocation d'un franc symbolique à l'APP, les prévenus se sont vus condamnés à 120 heures de travail d'intérêt général, ce qui constitue une première en matière de contrefaçon. Ce type de sanction traduit la volonté des juridictions de réprimer spécifiquement une délinquance informatique de plus en plus précoce.Haut de la page


Mise à jour pirate du système d'exploitation WANG
WANG Laboratories, WANG France, APP / EDA Système, EDA Sarl, SORAPE, SYNTHELABO Recherches, L'Institut de France
CA de Paris, 23 septembre 1997

Quatre saisies-contrefaçon : c'est le dispositif opérationnel anti-piratage mis en oeuvre par la société WANG avec les experts de l'APP, pour apporter la preuve de la violation de ses droits sur ses logiciels.

Après six années de procédure, la 1ère chambre de la cour d'appel de Paris vient de prononcer un arrêt qui fera jurisprudence.

A l'origine de cette affaire, une société EDA, anciennement distributrice des matériels et logiciels WANG, qui continuait, malgré la rupture du contrat avec son fournisseur, de reproduire et d'installer divers logiciels appartenant à WANG Laboratories. Plusieurs clients avaient suivi le mouvement, en décidant de se passer des prestations de maintenance, notamment évolutive, de la société WANG, pour les confier à EDA. Cette maintenance prenait la forme notamment de mises à jour du système d'exploitation, sur des matériels vendus neufs ou d'occasion par EDA.

Effectuées en l'absence de toute licence de WANG, ces copies et utilisations de ses logiciels sont constitutives de contrefaçon. La cour d'appel ne se contente pas de condamner le distributeur des copies illicites. Les clients, dont la mauvaise foi est établie, sont à considérer, selon la cour, comme "coauteurs" de l'infraction. La violation des droits d'auteur de WANG Laboratories est constituée, non seulement dans le cas d'une installation initiale, mais également en présence d'une mise à jour ("upgrade"). Celle-ci doit impérativement être effectuée dans le cadre d'une licence délivrée par le titulaire des droits sur les logiciels. La cour ne manque pas de rappeler que les utilisateurs ne pouvaient pas ignorer cette obligation. Il s'agit en effet de deux entreprises importantes : SYNTHELABO, filiale du groupe l'Oréal, SORAPE, centre d'information sur le crédit, et de l'Institut de France qui réunit cinq académies françaises, et qui a en vain cherché à s'abriter derrière les juges administratifs.

La perspective de l'an 2000 et du passage à la monnaie européenne met la question de la maintenance et de l'adaptation des systèmes informatiques sur le devant de la scène. Cette décision vient opportunément rappeler que les indispensables transitions doivent s'effectuer dans le respect des droits des auteurs.Haut de la page


Contrefaçon par l'ancien DG et quatre collaborateurs
CESA CONSULTANTS/SA PRIAM, Guy S., Eufiama R., Florence H., Emmanuelle L., Serge R.
TC de Nanterre, 24 septembre 1997

Guy S., ex-administrateur et ex-directeur général de la société CESA, avait sans doute cru pouvoir user librement d'un logiciel appartenant de droit à son entreprise. C'est fort de cette conviction qu'il crée une nouvelle société, PRIAM, bientôt rejoint par quatre anciens collaborateurs de CESA. L'équipe ainsi constituée reprend à son compte non seulement le fichier clients mais également un logiciel appartenant à CESA, déposé par cette dernière à l'APP.

L'action engagée par la société CESA débute par deux saisies-contrefaçon diligentées respectivement dans les locaux de la société nouvellement créée d'une part, et au domicile de Guy S. d'autre part. Ces opérations, menées par un huissier assisté d'un expert de l'APP, apportent la preuve de multiples détournements du patrimoine de CESA. Deux exemplaires du logiciel et un exemplaire du fichier clients sont identifiés dans les ordinateurs de la société PRIAM. Au domicile de Guy S., un fichier se rapportant au logiciel est découvert.

Le verdict du tribunal frappe à tous les niveaux du dispositif mis en place par les fraudeurs.

Au regard de la société Priam et de son dirigeant, le préjudice direct, réel et certain de CESA est fixé à 1 000 000 F. Le PDG est condamné solidairement avec sa société. Les salariés, également actionnaires de PRIAM, sont quant à eux solidairement condamnés à verser 100 000 F de dommages et intérêts à CESA. Le départ massif et simultané de ces personnes est stigmatisé par le tribunal, qui y voit une action concertée en vue de désorganiser la société qu'elles quittaient.

A l'heure où se multiplient les affaires mettant en cause la responsabilité des dirigeants (abus de biens sociaux...), ce jugement rappelle la protection qui s'attache au patrimoine immatériel des entreprises. L'atteinte portée aux droits de propriété peut aboutir à la mise en cause de la responsabilité personnelle des fautifs.Haut de la page


De nouveaux marchés pour les contrefacteurs : les forums de discussion sur le web
Encyclopaedia Universalis / Sang K.
TGI de Paris, 22 mai 1998

La société Encyclopaedia Universalis est éditeur et distributeur d'une oeuvre collective, un CD-ROM constitué de données reprenant sa collection et d'un logiciel permettant le traitement ainsi que la consultation de ces données. Cette société a saisi le tribunal aux fins de voir condamné Sang K. pour contrefaçon et fraude informatique. Sang K. a reconnu s'être livré, via les forums de discussion d'Internet, au commerce des CD contrefaisants. Compte tenu du préjudice commercial résultant de la concurrence déloyale (le CD-ROM est vendu 5000 F. ; les 30 copies ont été cédées à 200 F. chacune), et de l'atteinte à l'image de l'oeuvre, le contrefacteur a été condamné à verser à la victime 150 000 F. au titre des dommages-intérêts. Au surplus, sur l'action publique (délits de contrefaçon et d'atteinte à un système de traitement automatisé des données), les juges ont prononcé à son encontre une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis et 25 000 F. d'amende. Haut de la page



L'interpolarité : une limite à la protection du logiciel
Nomaï / Iomega Corporation
CA de Paris, 12 décembre 1997

La société de droit américain Ioméga Corporation, fabricante de disquettes et lecteurs de disquettes, allègue un trouble manifestement illicite causé par l'atteinte portée par la société française Nomaï, fabricante de la disquette “Super Flopy XHD”, à ses droits d'auteur sur la séquence de données originales (piste Z) et sur le logiciel “Oscar 100” qui sont propres aux disquettes Zip d'Ioméga.
La cour d'appel relève que la société Nomaï invoque à juste titre la directive du Conseil de l'Union européenne du 14 mai 1991 relative à la protection juridique des programmes d'ordinateur et l'article L 122-6-1-IV du CPI. En effet, en vertu de la directive (article 1-2 : les idées et les principes qui sont à la base des interfaces d'un programme d'ordinateur ne sont pas protégés par le droit d'auteur), Nomaï a le droit de reproduire la séquence d'identification indispensable à la réalisation de disquettes compatibles avec les lecteurs. Les normes du CPI, quant à elles, précisent que l'autorisation de l'auteur n'a pas lieu d'être demandée lorsque la reproduction du code du logiciel est indispensable pour obtenir les informations nécessaires à l'interopérabilité d'un logiciel créé de façon indépendante avec d'autres logiciels. En outre, les informations obtenues par “décompilation” d'un logiciel, accessoire d'un élément plus complexe, peuvent être utilisées pour la mise au point, la production ou la commercialisation d'un modèle de disquette compatible avec un lecteur. Haut de la page



Les articles 47 de la loi du 3 juillet 1985, et 425 et 426 du code pénal sont applicables quelle que soit la date de création du logiciel concerné
Alain L. / Claude B et Hervé G.,
CA de Bordeaux, 14 mai 1991 ; C.cass. 25 mai 1992

Le 24 janvier 1986, un contrat est conclu entre Alain L., président de la Sobomar (commerce de gros de poissonnerie), et la CBII, (exploitante des droits de commercialisation du logiciel conçu par Claude B. et Hervé G.) gérée par Claude B. Aux termes de ce contrat, Alain L. acquiert l'usage exclusif limité à l'Aquitaine du système informatique, “Télémarée”, comportant du matériel et le logiciel. Il s'avère que par la suite, Alain L. a commercialisé et fait évoluer ce dernier. Alain L. s'est-il rendu coupable de contrefaçon du logiciel ?
Les juges ont répondu par l'affirmative en menant le raisonnement suivant : la loi du 3 juillet 1985 dévoluant les droits patrimoniaux sur les logiciels de salariés à l'employeur n'est entrée en vigueur que le 1er janvier 1986 ; or, le logiciel ayant été créé avant cette date, la loi de 1985 ne s'applique pas; le logiciel du “Télémarée” est donc la propriété de Claude B. et Hervé G en vertu de l'article L 111-1 al.3 du CPI.. L'obtention de leur autorisation pour l'exploitation du programme d'ordinateur constituait une obligation incontournable à la charge d'Alain L. La cour d'appel de Bordeaux le 14 mai 1991 a rendu un arrêt confirmatif tout en sanctionnant le contrefacteur sur le fondement de l'article 426-1 du code pénal issu de la loi de 1985. D'un côté, la loi de 1985 était écartée, de l'autre, elle était appliquée. Alain L. s'était alors empressé de former un pourvoi en cassation. La Cour de cassation a maintenu la solution en vertu des articles 47 de la loi de 1985, 425 et 426 du code pénal : l'article 47 est applicable à la commercialisation du logiciel sans autorisation quelle que soit la date de création du logiciel. La cour fait la lumière sur l'application de la loi de 1985 dans le temps. Haut de la page



Epilogue : Le contrefacteur se retourne contre son conseiller juridique
Alain L. / Jean L.
CA de Bordeaux, 21 septembre 1995

Alain L. jugé contrefacteur a tendu à s'exonérer de sa responsabilité en se retournant en garantie contre le conseiller juridique de la Sobomar, Jean L., au motif que celui-ci a failli à son obligation de conseil : Jean L. aurait dû prévenir Alain L. quant à la portée de la loi de 1985 au regard des actes entrepris pour la commercialisation du logiciel.
La cour d'appel a condamné Alain L. à verser à Jean L. la somme de 6000 F en raison de l'impossibilité pour ce premier de rapporter la preuve de la défaillance professionnelle reprochée au conseiller. Il appert des faits que Jean L. ne connaissait guère l'existence du contrat liant Sobomar à CBII, et que Alain L. s'était comporté en propriétaire du logiciel. La cour a ainsi logiquement rejeté l'appel en garantie. Haut de la page



Logiciel inadapté : responsabilité du sous-traitant
Apsylog / CMG Infopoint, Adtr et Gilles Q.
CA de Paris, 4 juillet 1997

La cour d'appel, confirmant le jugement du tribunal de grande instance d'Evry rendu le 8 octobre 1995, considère qu'engage sa responsabilité contractuelle la société CMG qui a livré à l'association Adtr dont les attentes étaient clairement exprimées dès l'origine de la commande, un système informatique inadapté ne lui permettant pas de gérer ses réservations de gîtes ruraux ; il en était résulté à la charge d'Adtr l'impératif de réécrire les programmes et d'augmenter le matériel nécessaire à l'adaptation du réseau local. Et surtout, la cour a condamné la société Apsylog (sous-traitant de CMG pour la réalisation du logiciel dont la conception était la cause majeure des dysfonctionnements du système livré) à garantir CMG des condamnations prononcées contre elle à hauteur de 40 %.Cette décision est intéressante en ce qu'elle retient les responsabilités du maître d'oeuvre et du sous-traitant, concepteur du logiciel. Haut de la page



Compensation de dettes et logiciel
Jean-Bernard C. / Microformatic
CA de Paris, 28 mai 1998

Jean-Bernard C., auteur d'un logiciel appelé “GPF”, a eu recours à Microformatic aux fins d'éditer et de distribuer son logiciel. Afin de réactualiser le logiciel, Microformatic a embauché Jean-Bernard C. Les relations juridiques de ces deux partenaires ont été houleuses. En effet, dans un premier temps, Jean-Bernard C. a dû défendre ses droits d'auteur sur le logiciel (cf. CA Paris, 6 octobre 1995, “Le dépôt à l'APP, preuve de la titularité des droits d'auteur sur un logiciel et protection du nom de ce logiciel” sur www.legalis.net/legalnet/). Soutenu par l'APP, il a ainsi acquis une créance de 100 000 F à l'encontre de Microformatic. Dans un second temps, Jean-Bernard C. ayant rompu brusquement son contrat de travail sans respecter le délai de préavis (L 122-5 du code du travail), le conseil des prud'hommes et la cour d'appel (CA de Paris, 15 mai 1997) ont rendu l'auteur du logiciel débiteur de Microformatic de 120 000 F. Entre temps, Microformatic a été mise en liquidation judiciaire ; Jean-Bernard C. invoque alors la compensation des dettes.
La cour d'appel, dans son arrêt confirmatif, considère que “si les créances susvisées ont des causes juridiques différentes, elles n'en sont pas moins connexes comme nées dans le cadre d'un ensemble contractuel unique ...”. La connexité des dettes découle de l'imbrication des rapports des deux contractants : Jean-Bernard C. n'a été salarié de Microformatic que dans la seule mission de mise à jour du logiciel si bien que les actes de contrefaçon de la société et la démission sans préavis de l'auteur du logiciel sont intimement liés. En évitant d'opposer un créancier à une entreprise insolvable, cette solution présente un intérêt tout particulier.Haut de la page



Droit d'utilisation de logiciel ? Deux hypothèses
1- Utilisation personnelle au profit de tiers :
Steria / Infotel
C.cass., 1 juillet 1997

Infotel, concessionnaire du droit d'usage des logiciels de paie de la société Steria (fournisseur des progiciels), est-elle débitrice de redevances lorsqu'elle utilise lesdits logiciels dans le cadre des prestations de services informatiques à ses clients ? Non a répondu la Cour : “le contrat de concession de l'usage des logiciels “à titre personnel” s'entendait de leur utilisation par Infotel, concessionnaire, sur son propre ordinateur dans le cadre de son activité de prestataire de services informatiques pour l'établissement de la paie pour le compte de ses clients, d'où il résultait qu'aucune redevance n'était due à ce titre du chef du contrat dit de commercialisation qui concernait la concession, par Infotel à des tiers, de l'utilisation des logiciels”. Contrairement au droit commun de la propriété littéraire et artistique, les juges ont eu, en l'occurrence, une interprétation extensive du droit d'usage personnel. Il revient donc aux concédants de tels droits de définir leur champ avec minutie.

2- Recours à des tiers pour l'utilisation personnelle :
Tokos / Socapi et Ibsi Banque et Assurance
TC de Paris, 9 avril 1996

Socapi, bénéficiaire d'une licence de reproduction, d'adaptation des logiciels de Tokos et de reproduction, d'adaptation, et d'utilisation du savoir-faire de ces logiciels, peut-elle recourir à un tiers, ici Ibsi, pour en assurer la maintenance ? Oui selon le TC. L'autorisation de l'auteur n'est pas nécessaire pour tous les actes destinés à permettre l'utilisation du logiciel, conformément à sa destination, par la personne ayant le droit de l'utiliser, y compris pour corriger des erreurs. En l'espèce, les juges ont relevé que le tiers, Ibsi n'était pas un concurrent de Tokos, que son intervention s'apparentait à une mission d'intérim et enfin que la preuve du non respect de la confidentialité du savoir-faire n'était pas rapportée. Haut de la page



Quand l'obstruction à la saisie-contrefaçon entraine la présomption de contrefaçon
Cedip / Additional Euro Technologies et Ainf Zia
TC de Nanterre, 7 mai 1997

Cedip et Additional étaient liées par un contrat de commercialisation du produit PTR (ensemble de cartes électroniques et d'un logiciel). Dans l'exécution de ce contrat, Additional a manqué à son obligation de paiement de factures Cedip. A l'occasion des recours judiciaires en recouvrement de ces factures, il est apparu que le logiciel “Addelia” commercialisé par Additional ressemblait à s'y méprendre au logiciel “PTR Win” conçu par Cedip et déposé à l'APP.
Au cours de la saisie-contrefaçon descriptive (à noter : la cour de cassation a décidé que “l'omission de la formalité de la remise préalable de l'ordonnance au saisi ne constituait pas une nullité de fond” et que “celui qui s'en prévalait devait démontrer que l'omission de la formalité lui faisait grief”), le saisi ne s'est guère montré coopératif. De l'ensemble des faits, notamment le fait que le procès-verbal mentionne la présence de copies serviles du manuel d'utilisation du logiciel de Cedip, et de l'obstruction faite à la procédure par Additional, les juges ont retenu une présomption sérieuse de culpabilité d'Additionnal. Sur la base de cette présomption, le préjudice de Cedip est alors établi dans son principe. Quant à l'évaluation du préjudice, elle correspond à une perte de marge qui s'est élevée à 650 000 F. Cette affaire, où la contrefaçon est le fait d'une société en rapport étroit avec le concepteur du logiciel, est à rapprocher de la décision Wang Laboratoires Inc., Wang France, APP : EDA, EDA System et les autres ; TGI de Paris, 6 novembre 1992. Haut de la page



Un auteur de logiciel coupable de complicité de publicité mensongère
Alain G.
C.cass., 23 avril 1997

Une société de vente par correspondance spécialisée dans l'astrologie s'est servie, en tant que concessionnaire d'une licence d'utilisation, du logiciel “Astropack” conçu par Alain G. afin d'éditer automatiquement des prévisions et des thèmes astraux. Suite à de nombreuses plaintes, la société a été reconnue coupable de publicité trompeuse : bien loin de répondre à sa promesse de fournir aux clients une étude astrologique personnalisée, elle leur envoyait une consultation automatique réalisée grâce à “Astropack”. Alain G. a été jugé complice du délit sur le fondement de l'article L.121-5 du code de la consommation puisque, en tant que créateur du programme et rédacteur des lettres publicitaires reçues par les clients, il savait que les prestations de la société n'était pas personnalisées, et par voie de conséquence, il connaissait l'absence de véracité de la publicité. Haut de la page



Rapport d'expert et appréciation du préjudice subi par l'auteur du logiciel
Crcam du Midi et GIE Gaim / Sud conseil services et Steria
C.de cass., 4 mars 1997

En 1982, Sud conseil services (SCS) a livré son logiciel, Logicoop, à la Crcam afin qu'elle bénéficie d'une gestion comptable, financière et économique, informatisée des coopératives viticoles. En 1984, le GIE Gaim, crée par la Crcam, passe un contrat de maintenance du Logicoop avec SCS. Par la suite, dans le même temps, les liens contractuels ont été rompus avec SCS et deux sociétés dont Stéria ont réalisé le logiciel Vinilog. Un arrêt de la cour d'appel a résilié les contrats aux torts de la Crcam et du GIE Gaim, a constaté que Vinilog était une contrefaçon de Logicoop et enfin, a ordonné une expertise aux fins d'évaluer le préjudice. L'expert a conclu d'une part, que “les justifications de perte de contrats subie par SCS ne pouvaient être apportées” et d'autre part, qu' “il existait un préjudice plausible du fait de l'absence de conclusion de contrats”. La cour de cassation a approuvé la cour d'appel qui a déduit le préjudice de SCS à partir de ces deux constats du rapport d'expertise. Par contre, l'arrêt de la cour d'appel a été cassé en ce qu'il a obligé solidairement à la réparation du préjudice Crcam, GIE Gaim et Steria sur la considération “qu'il n'y avait pas lieu de détailler la part de chaque agissement fautif” alors que les sommes dues par chacun avaient été définies.Haut de la page


L'épuisement des droits favorise la commercialisation du logiciel
Microsoft Corporation, Microsoft France / Direct Price
TC de Créteil, 12 novembre 1996

Le législateur a voulu limiter la protection conférée par le droit de propriété intellectuelle, pour favoriser la libre commercialisation dans l'ensemble des états de la Communauté européenne, en disposant dans l'article L.122-6-3 du CPI que la première vente d'un exemplaire du logiciel, par l'auteur ou avec son consentement, épuise le droit de mise sur le marché de cet exemplaire ; cela signifie que l'auteur ne peut plus alors imposer de conditions de commercialisation sur le fondement de son droit d'auteur, sauf accords contractuels. En l'occurrence, la société Direct Price n'était pas liée contracuellement puisque les conditions d'exploitation figurant sur les emballages des produits Microsoft ne s'imposent qu'aux utilisateurs. Direct Price ne commet donc pas d'actes contrefaisants en revendant les logiciels, régulièrement acquis de Microsoft, sans appliquer les conditions de l'auteur (vente des logiciels “mise à jour” permise seulement si les utilisateurs justifient de la possession antèrieure d'un logiciel concurrent ou d'une autre version de logiciel Microsoft).
Sur l'épuisement des droits, voir aussi : GTX Corporation, Datagraph / Europ Data Système et les autres ; TGI de Paris, 6 avril 1994. Haut de la page



Concurrence déloyale autant que contrefaçon
Marc B., Infico / Serosi, Jean-Claude D.
CA de Douai, 1 juillet 1996

Marc B., ancien salarié de la société Serosi dirigée par Jean-Claude D. concepteur d'un logiciel innovateur dit de “mariage en cartonnerie” performant dans l'industrie de la cartonnerie, a livré le savoir-faire de son ancien employeur à son concurrent Infico qui a conçu et commercialisé à moindre prix un logiciel.
La cour d'appel, confirmant la décision de première instance, a jugé que le programme d'Infico reproduisait l'originalité du logiciel de Serosi (l'optimisation constituée par le système de “mariage et de couplage” particulier à cette industrie). Les différences quant au langage, aux annotations employées ne conféraient pas au logiciel d'Infico une originalité puisqu'ils reprenaient les mêmes grandeurs. et la ressemblance est très significative “les deux processus de calcul permettant d'arriver au résultat final déterminé sont identiques au niveau “principe mathématique de calcul” et au niveau “petites astuces simplificatrices”. Les contrefaisants devront verser la somme de 20 000 F à Jean-Claude D. en réparation de la violation de son droit moral, droit au nom.
Cette affaire prend tout son attrait puisque les juges ont aussi condamné au chef de la concurrence déloyale. Marc B. a détourné la clientèle de son ex-employeur, dévoilé un savoir-faire à un concurrent qui a mis sur le marché un produit contrefait à bas prix causant ainsi un préjudice certain à Serosi qui recevra 326 154, 22 F. à titre de réparation. En général, les faits n'emportent pas la réalisation des deux infractions.
Voir aussi : Simci, APP et Sondatic/Digimédia ; CA de Paris, 16 février 1994 Haut de la page



Refus de protection au "look and feel"
Marben GL / CAO Diffusion
TC de Meaux, 17 décembre 1996

Lorsque deux logiciels présentent des interfaces graphiques similaires, l'un est-il la contrefaçon de l'autre ? En l'espèce, CAO Diffusion ayant élaboré, déposé à l'APP et commercialisé son logiciel Wingep, avait saisi le tribunal de commerce en vue de voir juger contrefaisant le logiciel Open Process de Marben GL. Or, l'expert a constaté que l'état de l'art et les normes techniques existantes - normes utilisées pour structurer les images-écran, dessiner les icônes et les fenêtres, langage graphique amplement utilisé dans des logiciels d'ordonnancement de gestion de projet ou de conduite de processus industriel - ont déterminé les ressemblances entre les produits. Mise à part cette expression visuelle, chacune des créations présentait l'empreinte personnelle de leurs auteurs. Haut de la page



Une personne physique est l'auteur d'un logiciel qualifié d'oeuvre collective
Fabrice G. / Jean-Paul H.
C.cass., 3 juillet 1996

Fabrice G. est condamné pour contrefaçon en raison des conditions particulières qui ont conduit à la conception du logiciel Rise. En effet, Jean Paul H. avait pris l'initiative de la création du logiciel Rise devant s'intégrer dans un ensemble dont il avait la disposition pour permettre la réalisation d'images de synthèse de meilleure qualité ; il a lui-même participé avec d'autres ( notamment le rédacteur de la documentation relative au logiciel) à la création du logiciel qui était partie intégrante d'un système dont il avait le droit d'exploitation; les contributions des coauteurs s'étaient fondues dans l'ensemble sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun un droit distinct ; Jean-Paul H. a édité, publié, divulgué le logiciel sous son nom. Les critères de l'oeuvre collective (initiative, édition, publication, divulgation sont le fait d'une personne ; les participations des auteurs se fondent dans un tout) ayant été remplis, il était bel et bien l'auteur du logiciel. Haut de la page



Oeuvre collective : présomption de paternité
Informatique Formation et Gestion (IFG) / Nouveau Concept Informatique (NCI)
C.cass., 3 juillet 1996

L.113-5 du CPI : la personne morale qui divulgue et exploite sous son nom une oeuvre est présumée, à l'égard des tiers contrefacteurs, être titulaire sur cette oeuvre du droit de propriété incorporelle de l'auteur. En l'espèce, IFG, fournisseur de logiciels et d'assistance technique, avait réalisé un logiciel divulgué dès 1985. Quelques années plus tard, sur le même marché concurrentiel (Marché d'intérêt national de Rungis), NCI dont les prestations étaient similaires à celles de IFG, avait fourni le même logiciel. La justice ayant été saisie, NCI a réfuté l'accusation de contrefaçon en remettant en cause la paternité des droits de IFG sur le programme. La cour d'appel a donné gain de cause à NCI au motif que IFG ne rapportait pas la preuve de sa titularité des droits d'auteur. La Cour de cassation a sanctionné cette décision en vertu de l'article L.113-5 : "il incombait à NCI de rapporter la preuve contraire à la présomption de titularité dont devait bénéficier IFG". Haut de la page



Droits du commanditaire sur le logiciel développé ?
Mes Véronique Martin Delory et Guy Pamart, SCP Martin Delory-Pamart / Informatica France, Me Chriqui, Me de Thoré et IBM France
CA de Paris, 12 janvier 1996

En 1986, la SCP (société civile professionnelle regroupant des avocats) a commandé un logiciel à la société Organisation Conseil en Informatique (OCI) qui l'a conçu avec Informatica France et en étroite collaboration avec la SCP pour la définition du logiciel. En 1988, un protocole de commercialisation a été conclu entre la SCP et Informatica France : Informatica France commercialise, les avocats.participent à l'amélioration du logiciel et sont intéressés aux ventes. Les relations entre les parties se sont détériorées à deux reprises si bien que les juges ont été appelés à se prononcer sur leurs droits respectifs.
Les droits du commanditaire sur le logiciel réalisé sont fonction des stipulations contractuelles. Ainsi, à l'occasion d'un premier litige, si le tribunal de grande instance a permis à la SCP d'obtenir les codes sources, il a décidé que les droits d'auteur revenaient à OCI et Informatica France, créatrices du programme en question. La SCP, commanditaire du logiciel n'aurait eu un droit de propriété qu'en présence de clauses contractuelles allant dans ce sens. Malgré son étroite participation à la réalisation du logiciel, SCP n'avait qu'un droit d'usage. Puis lors d'un second litige, la cour d'appel de Paris a considéré que la SCP ne pouvait fonder ses prétentions sur un droit d'exploitation du logiciel puisque le protocole ne prévoyait en échange de leur participation à l'amélioration du programme qu'un pourcentage sur les ventes. Les juges ont donc cantonné les droits de la SCP à son intéressement aux ventes. Haut de la page



Violation du droit moral : un dommage évalué à 9 950 272 F
Easy soft et Sogal France / JPM Industrie, Sifisa, DLC Industrie et Me Leray, mandataire liquidateur de DLC
TC de Paris, 22 février 1996

Une société de services informatiques, Easy Soft, crée à la demande d'un franchiseur, Sifisa, 4 logiciels devant permettre une gestion automatisée et un système de liaison dans le réseau de franchisés (JPM Industrie et DLC Industrie). Par contrat, Sifisa, et par suite ses franchisés, bénéficient d'une licence exclusive d'exploitation sur les logiciels dont Easy Soft demeure propriétaire. Par la suite, Sifisa, DLC Industrie, JPM Industrie confient les droits d'exploitation des logiciels - avec l'accord d'Easy Soft - ainsi que la totalité des activités de franchise à Sogal France. Cependant, quelques mois après, elles dénoncent les contrats de franchise récemment signés avec Sogal France tout en continuant à utiliser les logiciels ou des dérivés.
Dans cette espèce, l'auteur, qui s'est interdit, par la concession d'une licence exclusive, de fournir à quiconque les mêmes programmes, ne peut avoir subi un manque à gagner. Le TC écarte alors le préjudice résultant de la violation du droit patrimonial pour retenir le préjudice moral : "Sifisa, JPM Industrie et DLC Industrie se sont appropriées de façon illicite, sans délai et sans bourse délier, des outils informatiques sophistiqués et uniques ... il est raisonnable de fixer le dommage subi ... à la valeur de conception déterminée par l'expert pour chaque logiciel utilisé de façon contrefaisante par chacune des sociétés (5 146 054 F. HT à la charge de Sifisa ; 2 402 109 F. HT pour chacun des deux autres contrefacteurs)". Au surplus, Sifisa, tenue à une obligation de secret, ayant divulgué le savoir-faire d'Easy Soft à des tiers, a été condamnée à payer à ce dernier, créancier de l'obligation de confidentialité, la somme de 2 200 000 F. HT (l'expert a évalué la valeur des informations divulguées à une année de travail pour un technicien de haut niveau). Haut de la page



Auteur salarié : oeuvre collective
Alain S. / Stab
TGI de Bayonne, 30 mai 1994 ; CA de Pau, 31 janvier 1996

Alain S., employé de Stab, a créé dans le cadre de son travail un logiciel dénommé Prosper. A la suite de la commercialisation de ce logiciel, Alain S. a été en justice pour se voir déclarer propriétaire de Prosper. Tant le tribunal que la cour d'appel ont rejeté sa demande et ont qualifié ce programme d'oeuvre collective. En effet, ce logiciel a été conçu dans l'exercice de sa profession ("Auteur salarié : L.113-9 du CPI " Philippe T. / DJCM Maintenance Système ; TGI de Paris, 9 juin 1995). De plus, la mise au point faite sous l'impulsion du directeur a nécessité une aide financière de la société, et la participation de plusieurs personnes, dont des informaticiens rémunérés par Stab. En outre, c'est la société qui a divulgué le logiciel. Ainsi, le logiciel ayant été conçu avant la loi de 1985, les droits d'auteur sur le logiciel ont été dévolus à l'employeur par la qualification d'oeuvre collective en application de la loi de 1957. Haut de la page



Auteur salarié : L.113-9 du CPI
Philippe T. / DJCM Maintenance Système
TGI de Paris, 9 juin 1995

Philippe T., employé de DJCM Maintenance Système, a créé dans le cadre de son travail un logiciel. Suite à son licenciement, il a prévenu son ancien employeur qu'il lui retirait la licence d'utilisation et que la persistance dans l'exploitation constituerait une contrefaçon. L'employeur ne cédant pas, l'affaire a été portée devant les juges qui ont donné gain de cause à la société DJCM Maintenance Système.
L.113-9 du CPI : "Sauf stipulations contraires, les droits patrimoniaux sur les logiciels créés par un employé dans l'exercice de ses fonctions ou d'après les instructions de son employeur, sont dévolus à l'employeur qui est seul habilité à les exercer".
Il ressortait des faits que la réalisation du programme s'était déroulée dans l'entreprise avec ses moyens. En outre, après s'être livrés à une comparaison des fonctions de Philippe T. avec les fonctions du logiciel en cause, les juges ont conclu qu'il apparaissait que "le développement du logiciel était une activité rattachable à l'activité normale de Philippe T.". Le logiciel ayant été créé dans l'exercice des fonctions du salarié ("Auteur salarié : oeuvre collective" Alain S. / Stab ; TGI de Bayonne, 30 mai 1994 ; CA de Pau, 31 janvier 1996) les droits d'auteur ont été dévolus à l'employeur sur le fondement de l'article L.113-9 du CPI. Haut de la page



Un faisceau de présomptions conduit à la qualification d'oeuvre collective
Pierre T. / Codat
CA de Colmar, 3 octobre 1995

Codat, propriétaire du logiciel "Sislam" commercialisé auprès des laboratoires d'analyse médicale, a fait appel ponctuellement à Pierre T., afin qu'il améliore le logiciel. Pierre T. a réclamé des droits sur le programme. La cour d'appel les lui a réfutés. Elle a considéré qu'il s'agissait d'une oeuvre collective en raison de présomptions précises et concordantes : "logiciel développé à l'initiative et sous la maîtrise d'oeuvre de Codat", commercialisé "sous le nom de Sislam, marque déposée par Codat", modernisé par Pierre T. avec le concours des salariés de Codat dont les contributions se sont fondues dans un ensemble indivisible. Au surplus, Pierre T. a facturé à un prix très élevé son travail si bien que les juges en ont déduit "une cession ou un abandon implicite des prérogatives d'auteur". En conclusion, la propriété incorporelle a été dévolue à la société et l'informaticien indépendant s'est vu interdire la reproduction, la communication, la distribution de l'oeuvre. Haut de la page



Une leçon à tirer : une action en contrefaçon se prépare
Mage / Pascal P.
TGI de Paris, 4 octobre 1995

La Sarl Mage, concessionnaire d'un droit exclusif d'exploiter le logiciel de gestion Mage, a confié à une société la distribution de ce logiciel. Elle a assigné un salarié de cette société, Pascal P., en contrefaçon. Seulement, son action a achoppé faute de preuve. En effet, la Sarl Mage, n'ayant pas fait procéder à une saisie-contrefaçon, ne produisait au débat qu'une lettre dans laquelle Pascal P. reconnaissait avoir repris les mêmes fonctionnalités. Dans l'incapacité de comparer les deux programmes en cause, les juges de première instance ont d'une part, retenu les propos du présumé contrefacteur déclarant la destruction du logiciel litigieux, et d'autre part, déclaré que "les fonctionnalités en tant que telles ne sont pas protégeables ; seule la forme du programme (c'est-à-dire l'enchaînement des instructions) peut être protégée, si elle révèle un effort personnalisé de l'auteur". Haut de la page



La procédure de saisie-contrefaçon est d'ordre public
Texel Informatique / Clarisse
C.cass, 23 mai 1995

La SA Clarisse a conclu avec la société Texel Informatique un contrat d'assistance technique dans lequel cette dernière avait le droit d'utiliser le logiciel, objet du contrat. Clarisse, relevant un usage abusif de ce droit a entrepris une saisie-contrefaçon à l'encontre de Texel Informatique. Suite à l'assignation devant le tribunal de Bobigny, le contrefacteur a soulevé l'incompétence du tribunal au profit des conciliateurs et des arbitres, procédure de règlement du litige prévue dans le contrat de maintenance au sein d'une clause compromissoire.
Une clause compromissoire peut-elle déroger à la procédure de saisie-contrefaçon ? La Cour de cassation fut très claire : "les faits reprochés à Texel Informatique ressortissaient au domaine de la contrefaçon ; en matière de logiciels, la saisie-contrefaçon autorisée et réalisée devait être suivie d'une assignation ou citation dans la quinzaine, sous peine d'annulation ; cette procédure judiciaire dérogatoire du droit commun s'imposait à toute action en contrefaçon, excluant la possibilité pour les parties de fixer elles-mêmes une autre voie, fût-ce par convention signée entre elles". Haut de la page



Une protection envers et contre tous
Serel France / Ville de Nice
TGI de Nice, 23 février 1995

L'administration se doit, elle aussi, de respecter les droits d'un auteur sur son logiciel.
En l'espèce, la ville de Nice avait confié à Serel France la gestion de la régulation du trafic routier et des groupes de feux de signalisation, gestion dont elle s'était acquittée en utilisant deux progiciels, Ramses et Cegur. La ville avait entrepris de changer de partenaire et se faisant elle avait tout de même conservé l'exploitation des programmes sans l'autorisation de Serel, auteur, mais par un acte administratif portant réquisition de ceux-ci. Serel a par conséquent entrepris, dans le même temps, diverses procédures (action contre le tiers exploitant en contrefaçon et concurrence déloyale, action contre le maire en annulation de son arrêté de réquisition des logiciels) dont une demande d'indemnisation portée devant le tribunal.
L'arrêté interdisant à l'auteur d'exploiter ses applications, applications utilisées gratuitement et sans permission par la ville, les juges lui ont octroyé en référé une indemnité provisionnelle de 1 500 000 F. Haut de la page



"L'apport créatif personnalisé" : un critère incertain
Agent judiciaire du Trésor et Trace / Softmax
CA de Paris, 31 mai 1995

Décision novatrice ou simplement aléatoire ?
En tout cas cet arrêt provoque la réflexion juridique en ce qu'il malmène l'histoire jurisprudentielle liée aux critères d'originalité et de contrefaçon.Softmax a créé et commercialisé un système expert Solon, organisé selon un schéma de questions/réponses et l'a mis à la disposition de l'administration aux fins de démonstration. Le ministère de l'Equipement a rompu les négociations et a créé son propre système, Rapace, commercialisé par Trace. Estimant qu'il constituait une contrefaçon, Softmax a fait procéder à sa saisie contrefaçon.
D'abord écartée par le TGI de Paris, la contrefaçon a été finalement reconnue en appel, les deux juridictions retenant d'ailleurs le bien-fondé de la demande en dommages-intérêts. La position de la cour mérite une attention particulière : au contraire des premiers juges, et sur le même rapport d'expertise, elle reconnaît une atteinte aux droits de propriété intellectuelle de Softmax. Pour établir l'originalité, l'arrêt se limite à évoquer la mise en forme de l'approche globale " questions/réponses " utilisée par le logiciel argué de contrefaçon ; il ne détermine pas plus précisément ce qui constituerait l'effort créatif personnalisé, critère considéré comme déterminant jusqu'alors. Quant à l'objet même de la contrefaçon, la cour se contente de l'unique similitude conceptuelle consistant à utiliser la même démarche en questions/réponses. Elle ne tire aucune conclusion du fait que ni la programmation ni l'architecture, ne présentent de points communs. Les insuffisances de la motivation permettent donc difficilement de comprendre la réalité de l'atteinte aux droits de propriété intellectuelle.
Volonté jurisprudentielle délibérée ou dérive isolée ?
Cette décision en rupture avec le respect des critères classiques ne peut qu'inciter le créateur de logiciels à la plus grande prudence. Haut de la page



L'épuisement des droits en matière de distribution de logiciels
GTX Corporation, Datagraph / Europ Data Système et les autres
TGI de Paris, 6 avril 1994

Pour suivre la théorie de l'épuisement du droit, le TGI de Paris a décidé, le 6 avril 1994, que le titulaire des droits de propriété intellectuelle ne peut s'opposer à la commercialisation des produits protégés par le droit d'auteur dans un Etat membre, dès lors qu'ils ont été mis en circulation, avec son accord, sur le territoire d'un autre Etat membre. En l'espèce, GTX Corporation ayant conclu un contrat de distribution avec une société néerlandaise, contrat au terme duquel elle autorisait celle-ci à commercialiser dans un Etat membre les logiciels litigieux, et donnait le droit à l'utilisateur final de les utiliser pour une durée indéterminée, elle ne peut s'opposer à la vente de ces logiciels sur le territoire français. La contrefaçon pour utilisation et commercialisation sans droit qu'elle invoquait n'est pas, dès lors caractérisée ; c'est pourquoi, le tribunal l'a déboutée de ses demandes de ce chef.
Cette décision rappelle que la directive européenne du 14 mai 1992 s'impose au juge national puisque la loi du 10 mai 1994 l'a transposée en droit interne. Haut de la page



Contracter de bonne foi avec un contrefacteur : pas de délit
IB Télématic / Sagaprint, Télématique France et les autres
C. cass., 29 mars 1994

Télématique France a conclu le 9 juin 1986 deux contrats : l'un avec Efeb, l'autre avec Sagaprint portant sur l'obtention d'un logiciel et l'usage d'un centre serveur de télématique, destinés à l'exploitation d'un jeu télévisé. A la suite, de la conclusion entre Efeb (par l'intermédiaire de Sagaspe) et IB Télématic d'un accord ayant un contenu semblable au précédent contrat, qui fut dénoncé, Télématique France fit procéder à une saisie-contrefaçon et assigna pour contrefaçon de logiciel.
En première instance, les juges ont prononcé la résiliation du second contrat. La Cour de cassation distingue entre l'exploitation d'un jeu au moyen d'un logiciel dont la propriété n'est revendiquée que par TF, ce qui n'est pas assimilable à une contrefaçon, et la copie d'un logiciel à proprement parler condamnable au titre de la loi du 3 juillet 1985 sur la protection des logiciels. En l'espèce, rien ne montre qu'Efeb savait qu'au moment de la conclusion du contrat, IB Télématic proposait un logiciel contrefaisant celui de Télématique France. IB Informatic est donc seule responsable de ses actes frauduleux: le contrat est résolu à ses torts exclusifs. Haut de la page



Concurrence parasitaire plutôt que contrefaçon
Simci, APP et Sondatic / Digimédia
CA de Paris, 16 février 1994

La société Digimédia est condamnée, moins parce qu'elle a été convaincue de contrefaçon de logiciels, que sur le chef de la concurrence parasitaire. En effet, il s'avère que les juges s'en remettent aux experts qui, en l'espèce, soulignent que les logiciels présumés contrefaisants ne sont pas "une copie servile", mais plutôt des perfectionnements, et que "les similitudes et pourcentages de recouvrement constatés ne sont pas critiquables pour la partie basse", et que, pour la partie haute, "les modifications fondamentales de la forme et du fond donnent au logiciel critiqué un aspect distinctif, exclusif de toute contrefaçon". Il aurait sans doute été plus conforme à la théorie de fonder une condamnation sur l'existence d'instructions identiques. Haut de la page



Les opérations de saisie contrefaçon avaient été mal conduites
Kaytel Vidéo France / Nintendo
CA de Paris, 14 janvier 1994

Nintendo, soupçonnant Kaytel de commercialiser des versions contrefaisantes des jeux dont elle est propriétaire, les a fait acquérir par un de ses employés puis a fait procéder à une saisie contrefaçon dans les locaux de sa concurrente. Ensuite, elle l'a assignée devant la cour d'appel de Paris pour usurpation et usage illicite des marques.
Le tribunal a fait droit à ses demandes. En appel, il a été décidé que l'absence des cassettes contrefaisantes dans les locaux de Kaytel le jour de la saisie ne permettait pas d'affirmer qu'il y avait eu contrefaçon ; Kaytel a pu valablement contester la valeur probante des informations obtenues dans un cadre extra-judiciaire.
Cette décision manifeste que le droit des signes distinctifs reste un droit à part entière et qu'il n'a pas à être utilisé subsidiairement pour palier un défaut de preuve dans une procédure de saisie-contrefaçon. Haut de la page



Le logiciel ne se dissocie pas de ses codes sources
Altitude Ingénierie / Me Ouizille, liquidateur de la SA Henri Polad
TC de Nanterre, 30 novembre 1993

A la suite de la liquidation judiciaire de la société Henri Polad, qui exploitait un progiciel dénommé "Relations Expert", le liquidateur, Me Ouizille, a mis en vente les éléments de ce progiciel à la société Diagora.
La société Altitude Ingénierie, ayant déjà obtenu les codes sources du progiciel par l'intermédiaire de M.S., ancien salarié de la société Henri Polad, et ayant échoué dans la tentative de racheter la marque "Relations Expert", conteste auprès du tribunal de commerce de Nanterre la vente de la totalité du progiciel : seuls les codes sources du progiciel devaient être cédés.
Les juges ont sanctionné les demandeurs, en rejetant leur thèse tendant à dissocier le progiciel de ses codes sources puisqu'au jour de leur demande, celui-ci avait déjà été acheté par la société Diagora. Tous les moyens ne sont pas bons pour acquérir une marque manquante... Haut de la page



Propriété du logiciel et exception de transaction
Eric A., Météor / Microland
CA de Paris, 8 novembre 1993

Microland avait saisi le TGI de Paris pour faire constater des actes de contrefaçon qui auraient été commis par la société Météor. En effet, la présence du module "P base" de Microland, dans le logiciel Météor, avait constitué au regard du jugement de première instance un acte de contrefaçon.
Mais la cour d'appel infirme cette décision : Microland, qui ne peut prétendre à la qualité d'auteur de "P base" du seul fait de son acquisition, a pu, dans le cadre d'une transaction conclue le 14 septembre 89, valablement renoncer à ses droits selon le droit commun (articles 2048 et 2049 du code civil). Les appelants, ayant exécuté ladite transaction, sont donc fondés à opposer à la demande en contrefaçon de Microland l'irrecevabilité découlant de la chose jugée en dernier ressort.
Par ailleurs, Microland qui, fort légèrement, avait exploité la condamnation de son adversaire à des fins commerciales, a été sanctionnée par la cour qui a retenu "une utilisation abusive des termes du jugement aux fins de nuire auprès de la clientèle". Cette mesure exemplaire rappelle le respect qu'il convient d'apporter au "double degré de juridiction", bref, incite fermement à la modestie et à la prudence tant que la décision ultime n'est pas survenue. Haut de la page



Le droit au respect du nom en cas de cession
H. de P. / Framatome
TGI de Nanterre, 13 janvier 1993, 2 novembre 1993

Quelle est l'extention du droit moral du créateur de l'oeuvre logiciel, compte tenu de la liberté d'adaptation dont jouit le cessionnaire ?
Cette question, avec celle de la validité de la rémunération forfaitaire, était au coeur du litige qui opposait H. de P., auteur du programme destiné à l'armée, et Framatome, cessionnaire des droits d'exploitation.
Le TGI de Nanterre y a répondu dans son jugement du 13 janvier 1993, suivi le 2 novembre 1993 d'une ordonnance de référé.
H. de P., licencié par Framatome, a tenté de mettre fin au contrat de cession des droits d'exploitation qui les liait en contestant auprès du tribunal la validité du principe de la rémunération forfaitaire qui lui était appliqué. Cette demande a été rejetée mais un autre point juridique important a été analysé : le droit moral du créateur s'étend jusqu'au nom de l'oeuvre s'il a été altéré pour la commercialisation. Par son ordonnance du 2 novembre 1993, le TGI a estimé que "restant investi du droit moral d'auteur", H. de P. était bien fondé à réclamer que son nom figure pour "l'avenir" sur ce logiciel et sa documentation technique et commerciale, et non pas qu'il soit substitué à celui de Framatome, le contrat de cession n'ayant pas été annulé. Le nom "H. de P." doit également figurer sur les adaptations réalisées avec, puis sans le concours de l'auteur. Toutefois, H. de P. est débouté pour le surplus "dès lors que l'intéressé, en cédant ses droits, ne peut s'opposer à l'adaptation de son oeuvre, aussi dénaturante soit-elle". Haut de la page



8 000 000 F de dommages - intérêts pour contrefaçon
Digitechnic / Sodix et les autres
CA d'Amiens, 2 juillet 1993

Digitechnic a développé un logiciel de gestion de super et hypermarchés Elle a ainsi informatisé trois sociétés : Sodix, Sodimer et Sodival qui ont créé une Sarl Imaginatic. Cette dernière a commercialisé illicitement les logiciels de Digitechnic.
Digitechnic saisit le TGI de Compiègne, qui ordonne une expertise. La cour d'appel d'Amiens retient la contrefaçon et condamne les trois sociétés à verser près de 8 000 000 F à titre de dommages-intérêts à Digitechnic.
Le montant des condamnations est l'un des plus importants qu'une juridiction du second degré ait jamais prononcé. Haut de la page



Manque d'originalité : pas de droit d'auteur mais concurrence parasitaire
CTL / Ippolis Informatique et M.H.B.
CA de Paris, 5 avril 1993

Estimant que la société Ippolis, fondée par trois des anciens salariés, commercialise un centre serveur qui a été copié, la société CTL fait procéder à une saisie-contrefaçon. La cour refuse la protection par le droit d'auteur mais retient le chef de la concurrence parasitaire, avec main-levée de la saisie. Cette décision est surtout intéressante en ce qu'elle rappelle que tous les logiciels ne sont pas protégeables par le droit d'auteur, la condition de la protection étant l'originalité de l'oeuvre, qui s'apprécie, selon une jurisprudence constante, au regard de l'apport personnel de son auteur. Haut de la page



La reproduction illicite d'un logiciel n'est pas constitutive d'un vol mais d'une contrefaçon
L.F., P.P., A.M. / le Ministère public, B.H.
CA de Paris, 25 novembre 1992

Un ancien salarié est accusé de vol de logiciels, de documentation et de disquettes informatiques. L'arrêt, confirmant sur ce point le jugement déféré, considère que des transferts de disque dur à disquettes et inversement, portant exclusivement sur des données immatérielles, ne sont pas constitutives du délit de vol, "ces opérations de copiage n'ayant entraîné aucun transfert dans la possession des données informatiques". Mais les juges du second degré, requalifiant les faits, estiment que l'accusé s'est rendu coupable non d'un vol, mais d'une contrefaçon de logiciel. Cette décision présente aussi l'intérêt de rappeler que l'action publique peut être mise en oeuvre par l'utilisateur licite. Haut de la page



Le commerce de la contrefaçon sanctionné par 270 000 F d'amende
Pierre T. et Central Cadeaux / Irem Corporation
CA de Metz, 3 juillet 1992

L'infraction portait sur trois logiciels seulement, mais la cour a pris en compte le trafic international qui permet leur diffusion. Pierre T., poursuivi pour avoir importé de Corée des logiciels de jeux identiques à ceux commercialisés par Irem, a été condamné à la fois sur le chef de la contrefaçon de marque, les préjudices découlant de ces atteintes étant nettement distingués. Cette affaire exemplaire a ainsi été marquée par une décision que l'on peut considérer comme plus répressive que réparatrice. Haut de la page



Trois fois coupable
Procureur de la République / G.D. et autres
TGI de Béthume, 10 mars 1992

Pour simplifier sa comptabilité, un commerçant a intégralement recopié le contenu des disques contenant le logiciel régulièrement acquis par le cabinet de comptabilité qui gérait son dossier. Par cette opération où il s'était assuré la complicité de membres de sa famille et du cabinet, ainsi que d'un technicien, il s'est du même coup approprié des informations relatives à d'autres clients et au personnel même du groupe. C'est ainsi qu'il s'est rendu coupable à la fois de contrefaçon, d'accès frauduleux à un système de traitement automatisé et de collecte illicite d'informations nominatives.
Le tribunal qui a été ainsi amené à mettre en application les trois lois fondatrices du droit de l'informatique (celle du 6 janvier 1978 relative aux traitements de données nominatives, celle du 3 juillet 1985 sur la protection des logiciels et celle du 5 janvier 1988 sur la fraude informatique) l'a condamné à trois ans d'emprisonnement avec sursis et 5000 F d'amende. Haut de la page



La cession des droits d'auteur n'est jamais tacite
M.G. / Nortène
CA de Douai, 21 novembre 1990

Un logiciel original (dès lors protégeable par le droit d'auteur) est mis au point par un salarié de la société Nortène, qui l'exploite et le commercialise auprès de plusieurs de ses clients. Alors que la cour d'appel retient la cession tacite des droits du salarié, la Cour de cassation, visant l'article L.131.-3 CPI, rappelle qu'une telle cession est soumise à l'exigence d'un contrat écrit, dans lequel chacun des droits cédés fait l'objet d'une mention distincte. Il n'en demeure pas moins que, depuis la loi de 1985, les logiciels créés par les salariés appartiennent à l'entreprise qui les emploie. Haut de la page


Contrefaçons en violation des droits des auteurs et de leurs licenciés
Ministère public, APP / Francis B, Lionel D, Carlos P, Didier P
TGI de Carcassonne, 6 mai 1998

Francis B., Lionel D., Carlos P., Didier P. ont frauduleusement copié, détenu et échangé des logiciels dans le mépris des droits d'auteur et au préjudice des Sociétés et Associations qui avaient acquis les licences d'utilisation de ces logiciels. L'étendue du préjudice était conséquente tant par le grand nombre de copies réalisées que par la variété des programmes reproduits (logiciels utilitaires, de bureautiques, de jeux). L'un des prévenus avait même exercé, clandestinement, la profession de comptable au moyen de ce matériel illicitement obtenu.
Le Procureur de la République et l'Agence pour la Protection des Programmes, partie civile, ont poursuivi ces quatre contrefacteurs de logiciels devant le tribunal qui les a condamnés chacun à des amendes allant de 2 500 F à 20 000 F. En outre, l'APP a obtenu 30 000 F de dommages et intérêts ainsi que la remise des disquettes litigieuses afin de les détruire. Haut de la page


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